Vous avez peut-être raté cette information incroyable pendant vos vacances : au deuxième trimestre, la croissance française a atteint +0,3%. Le ministre de l’Économie, Éric Lombard, n’a pas pu cacher son enthousiasme au micro de RTL mi-juillet : « C’est vraiment une bonne nouvelle : 0,3%, ça veut dire que depuis le début de l’année, on a une croissance légèrement supérieure à 0,5% ». Waouh ! Mais devons-nous vraiment fanfaronner ? Évidemment, non.

Le gouvernement anticipe une croissance cette année à +0,7%. Les économistes sérieux tablent sur +0,5%. C’est un échec comparé à l’an dernier lorsque la croissance était à +1,1%. Et même à ce moment-là, il n’y avait aucune raison d’être satisfait. C’est médiocre. Tous les moteurs de la croissance française sont en panne : la demande intérieure est quasi nulle, les perspectives d’embauche et d’investissement sont en berne, les hausses de salaire faibles et le commerce extérieur – même si ça n’a jamais été notre fort – est en chute libre à cause du regain de protectionnisme. Ajoutons à cela la hausse de l’euro qui commence sérieusement à pénaliser nos PMEs exportatrices.

 

L'édito Centaure Investissements par Christopher Dembik

Dette publique : ça va piquer​

 

La faute à Trump ?

 

L’Administration Trump a bon dos. D’autres pays européens, qui ont fait d’autres choix budgétaires notamment, s’en sortent bien mieux que nous. C’est le cas des anciens PIIGS – Italie, Grèce, Espagne, Portugal. L’une des raisons fondamentales de l’atonie française, c’est que l’État, lourdement endetté, accapare tel un ogre insatiable toutes les richesses.

Le déficit français devrait atteindre cette année 5,4% – parmi les plus élevés de l’Union Européenne. Seule la Roumanie fait pire. Petite différence toutefois, le gouvernement roumain a présenté un ambitieux plan structurel en juillet qui devrait significativement améliorer les finances publiques. Ce chiffre abstrait de 5,4% ne permet pas de comprendre la gravité de la situation. Allons dans le détail. Les recettes fiscales sont de 308 milliards d’euros tandis que les dépenses nettes sont de 444 milliards d’euros – ce qui représente un déficit abyssal de 139 milliards d’euros.

 

Ce déficit représente 45% des recettes de l’État

 

139 milliards d’euros, oui, c’est 5,4% du PIB. Mais c’est aussi et surtout que ce déficit représente 45% des recettes de l’État. Si on ajoute 100 milliards d’euros de remboursement des intérêts des emprunts contractés sur les marchés financiers, le mur devient inévitable. La faute au gouvernement actuel mais aussi à tous les précédents qui n’ont clairement pas géré la dette publique et n’ont fait qu’accroître le poids de l’État dans l’économie. C’est toujours plus facile d’augmenter la fiscalité.

Prenons France Travail (anciennement Pôle Emploi). Son rôle est essentiel. Ça ne fait pas partie des agences de l’État qu’il faut supprimer. En revanche, on peut être interloqué par le coût de la structure de France Travail par rapport au montant des allocations versées. C’est un budget annuel de 5 milliards d’euros qui paraît exorbitant et qui pourrait tout à fait être réduit via une automatisation des contrôles et des flux financiers. Bref, exactement la même démarche que toutes les entreprises font pour réduire les coûts inutiles.

 

Et maintenant ?

 

La situation ne peut qu’empirer. En 2026, la France va devoir émettre 310 milliards d’euros de dette si on s’en tient aux prévisions du gouvernement Bayrou qui ont peu de chances de changer substantiellement. C’est énorme. C’est énorme surtout quand on sait que la dette française est en concurrence avec les autres dettes européennes pour trouver des acheteurs étrangers. Pendant longtemps, les investisseurs se sont reportés sur la dette française car l’Allemagne – qui est considérée comme l’émetteur le plus fiable de la zone euro – s’endettait peu. Les choses vont changer l’an prochain.

Les émissions de dette allemande vont atteindre 330 milliards d’euros. S’ajoute à cela la dette italienne qui est aujourd’hui perçue comme moins risquée que la dette française, tout simplement parce que le gouvernement Meloni a fourni des efforts pour baisser le déficit. Nous allons nous retrouver l’an prochain dans une situation inédite. Notre dette va être en concurrence avec celle de l’Allemagne et de l’Italie et comme les investisseurs vont privilégier plutôt celle de ces deux pays, notre taux d’emprunt va continuer de monter inexorablement – ce qui est le cas depuis 2021. Pour finir en beauté, nous savons tous que l’ajustement budgétaire proposé par le gouvernement Bayrou est insuffisant et ne sera certainement pas mis en application complètement. C’est un cocktail parfait pour une crise ou, dans le meilleur des cas, un lent décrochage de la France.

 

La situation est différente

 

Nous doutons d’un scénario façon crise grecque de 2009 pour la France. La situation est différente. Il n’y a pas de manipulation des comptes publics. Les agences de notation, même si elles vont rétrograder notre dette, ont encore confiance dans la signature de la France. En revanche, un lent déclassement marqué par un appauvrissement des Français et une hausse continue des prélèvements par l’État afin de payer un train de vie qui n’est plus tenable est fortement probable. N’est-ce d’ailleurs pas pire qu’une grave et soudaine crise ? Car, soyons réalistes, c’est quand on est au pied du mur qu’on réforme.

Depuis la Covid, aucune réforme structurelle n’a été engagée. Rien. Juste des ajustements mineurs. Malheureusement, cela conduit à une croissance atone, à un appauvrissement de la population (la smicardisation de la société française entamée depuis les années 1980 est bien documentée), et à une perte inexorable de compétitivité de nos entreprises.

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