L’année 2025 s’est jouée sur quelques chiffres simples à retenir. Ils éclairent, mieux que de longs discours, les forces à l’œuvre dans l’économie mondiale, les marchés financiers et la gestion de patrimoine. Voici ce qu’il faut comprendre pour décider, investir et se projeter dès maintenant.
2025 en dix repères
L’Allemagne a ouvert le ban avec un programme d’investissement public inédit par son ampleur et son horizon. Cinq cents milliards d’euros, étalés sur dix ans, redessinent la ligne de crête d’un pays longtemps attaché à la discipline budgétaire. Berlin assume une lecture plus souple de son « frein à l’endettement » pour moderniser ses infrastructures et muscler sa défense. L’effet attendu va bien au-delà d’un simple stimulus. En soutenant la demande aujourd’hui et la productivité demain, ce cap pourrait ajouter entre un demi-point et un point de PIB par an sur la décennie. À condition, toutefois, que l’exécution suive le plan. Dans un contexte de vieillissement démographique et de transition énergétique, cet activisme budgétaire marque un tournant et crée un nouvel étalon pour l’Europe continentale.
Outre-Atlantique, la politique commerciale a repris le devant de la scène. Le relèvement du niveau moyen des droits de douane américains, au plus haut depuis près d’un siècle, a installé une chape d’incertitude sur les chaînes de valeur mondiales. L’activation de textes fédéraux emblématiques, combinée à un discours pro-tarif, a tendu l’ensemble du tissu économique. Les entreprises ont révisé leurs plans d’investissement, les importateurs ont renégocié leurs contrats et les consommateurs ont subi une inflation « importée » sur certains segments. La grande question pour 2026 est claire : ces mesures et leurs mécanismes de redistribution permettront-ils de lisser une croissance en « K » pour retrouver une trajectoire plus homogène, typée « V » ? Les marchés attendent des preuves tangibles, chiffres à l’appui.
Les places boursières, elles, ont tenu la vedette.
Pour la troisième année consécutive, les actions mondiales ont enchaîné des gains supérieurs à 20 %. C’est exceptionnel par sa durée comme par sa diffusion. Les émergents se sont illustrés, portés par l’industrialisation de l’IA et la vigueur de l’Amérique latine ; l’Europe a profité d’un redressement domestique ; le Japon a confirmé sa sortie du piège déflationniste. Mieux, ces performances ne reposent pas uniquement sur la promesse : la progression des bénéfices s’est ajoutée à une expansion des multiples, catalysée par la chute du coût du capital perçu et par l’enthousiasme autour des gains de productivité liés à l’automatisation. Pour l’allocation d’actifs, la leçon est double : d’un côté, la diversification géographique redevient payante ; de l’autre, la qualité des bilans et la visibilité sur les cash-flows continuent de faire la différence.
Le dollar, baromètre planétaire du risque, a décroché de 10 % en termes pondérés du commerce. Ce mouvement s’est produit alors même que la volatilité actions connaissait une large amplitude, avec un S&P 500 balloté entre pertes et gains à deux chiffres. Fait rare, actions, obligations et billet vert ont reculé de concert sur une séquence baptisée « Liberation week ». Ce trio à la baisse interroge la place singulière des États-Unis dans l’architecture financière mondiale. Lorsque l’émetteur de la première monnaie de réserve vacille, les corrélations bougent et les moteurs classiques de couverture fonctionnent moins bien. Pour un investisseur, cela implique de revoir la gestion du risque de change, d’ajuster les couvertures et de ne plus considérer la force du dollar comme donnée en toutes circonstances.
« La tech »
Dans la technologie, 2025 a vu un jalon symbolique : Nvidia a franchi les 5 000 milliards de dollars de capitalisation. Au-delà du chiffre, c’est la preuve que l’investissement massif dans l’intelligence artificielle se monétise effectivement dans la chaîne des semi-conducteurs. L’architecture GPU, difficile à répliquer, a permis de préserver des marges supérieures à 70 %, tout en entraînant toute une galaxie de fournisseurs d’infrastructures. L’euphorie s’est cependant tempérée au fil des mois avec le retour des préoccupations liées au coût du capital. Ce rééquilibrage est sain : il incite à distinguer les projets créateurs de cash-flows des narratifs séduisants mais trop capitalistiques. Pour les portefeuilles, le bon prisme consiste à isoler les « picks and shovels » réellement indispensables à la capacité de calcul et à surveiller l’évolution des barrières à l’entrée technologiques.
Autre actif vedette, l’or a bondi d’environ 60 % sur l’année, affichant sa deuxième meilleure performance en un demi-siècle. Le métal jaune a servi de filet de sécurité face au doute qui entoure les monnaies fiduciaires et aux tensions géopolitiques persistantes. La perspective d’un assouplissement monétaire dans les grands blocs a aussi abaissé le coût d’opportunité de la détention d’or. Ce rallye rappelle une règle simple de construction de patrimoine : une poche de diversification « réelle » protège contre des scénarios où les actifs financiers traditionnels baissent simultanément. La clé consiste à calibrer cette poche sans sacrifier la liquidité globale du portefeuille, en privilégiant des véhicules de détention transparents et à faibles coûts.
Sur les courbes souveraines, la pentification a continué.
L’écart entre 2 ans et 30 ans américains s’est élargi d’environ 70 points de base, un mouvement aussi observé en Allemagne et au Japon. La hausse des taux longs a plusieurs ressorts : déficits durables, soutien budgétaire, incertitude sur la trajectoire d’inflation et allongement du cycle. Pour un investisseur obligataire, cela change la donne. La duration longue reste exposée à des vents contraires, tandis que le portage sur des maturités intermédiaires conserve un profil rendement/risque plus lisible. Les stratégies de pente, actives et tactiques, retrouvent de l’intérêt, tout comme les couvertures de taux plus fines, adaptées aux scénarios de « higher-for-longer ».
Dans le crédit, la performance 2025 vient… du portage, à 100 %. Les spreads se sont tassés vers leurs niveaux d’avant 2022, dans un environnement de volatilité contenue. Mais sous la surface, des fragilités apparaissent. Le segment private credit montre des poches de tension ; sur les marchés publics, des dossiers emblématiques ont connu des restructurations à répétition. Dans cet univers très dispersé, la sélection redevient un facteur décisif. Mieux vaut privilégier des émetteurs à gouvernance solide, capex maîtrisés et visibilité sur la génération de cash. La discipline sur le levier d’endettement, les covenants et la liquidité du marché secondaire constitue un garde-fou indispensable. Le message pour 2026 est pragmatique : cueillir le portage, mais pas à n’importe quel prix, et accepter de laisser filer les rendements « trop beaux pour être vrais ».
Le baril est passé sous 60 dollars
Plus surprenant, le baril est passé sous 60 dollars, un plus bas de l’ère post-Covid hors récession. L’explication tient à une offre abondante, à une demande un peu fatiguée et à l’idée que les risques géopolitiques, pour une fois, ne menacent pas les flux physiques. Paradoxalement, même un épisode militaire majeur au Moyen-Orient a réduit la prime géopolitique en clarifiant le risque de perturbation. Cette détente des prix porte un double effet macroéconomique : soulager le pouvoir d’achat des ménages et ancrer la désinflation. Pour la construction de portefeuille, cela milite pour des arbitrages sectoriels : alléger l’exposition aux producteurs les plus sensibles au prix du baril et renforcer des secteurs consommateurs d’énergie qui bénéficient mécaniquement de la baisse des coûts.
En France, la politique a cessé de surprendre à chaque trimestre. Deux changements de Premier ministre seulement en 2025, c’est mieux qu’en 2024. Pourtant, l’instabilité reste palpable dans la prime de risque. L’écart de rendement à dix ans avec l’Allemagne s’est d’abord accru avant de revenir vers ses plus bas. Signe des temps, des signatures d’entreprises de premier plan se sont financées à des taux inférieurs à ceux de l’État. En Bourse, le CAC 40 a une nouvelle fois fait moins bien que ses voisins : moitié de la performance du DAX, deux tiers de celle du FTSE MIB et un quart de l’IBEX. Pour les investisseurs domestiques, la réponse n’est pas de bouder Paris, mais de diversifier davantage vers l’Europe du Sud, de jouer la reprise sectorielle et d’exiger une décote réelle sur les dossiers hexagonaux les plus cycliques.
Que retenir, au final, pour la gestion de votre patrimoine ?
D’abord, l’Europe s’autorise un peu plus de politique économique, ce qui nourrit des opportunités d’investissement dans les infrastructures, l’industrie et l’innovation. Ensuite, le leadership boursier se partage désormais entre plusieurs zones, ce qui valide une diversification géographique active. La technologie reste le moteur, mais la sélection devient cruciale pour éviter la surconcentration. Sur le plan obligataire, le portage fonctionne, mais la rigueur sur le risque d’émetteur et sur la duration s’impose. Enfin, la baisse du pétrole et le repli du dollar modifient subtilement les équilibres de couverture et de sensibilité sectorielle.
Pour 2026, préparez des portefeuilles capables d’encaisser plusieurs scénarios. Si la croissance se normalise sans choc, les actions de qualité hors États-Unis, appuyées par des bilans robustes, devraient rester en tête. Si l’activité cale, les obligations de maturité intermédiaire joueront leur rôle d’amortisseur, à condition de garder des liquidités disponibles pour saisir des points d’entrée. Dans tous les cas, une poche d’actifs réels – or, infrastructures cotées, immobilier coté sélectionné – continuera de diversifier utilement. La discipline, l’équilibre et la réactivité restent vos meilleurs alliés dans un monde où les corrélations bougent plus vite qu’avant.
DISCLAMER
Ce contenu est informatif et général, et constitue ni conseil personnalisé ni sollicitation. D’autre part, vos objectifs, votre situation et votre tolérance au risque restent déterminants. Par conséquent, consultez un professionnel avant toute décision car tout investissement comporte un risque de perte en capital. Les performances passées ne garantissent pas les performances futures. De plus, la fiscalité évolue et dépend de votre cas personnel. Les données et hypothèses peuvent changer sans préavis ; vérifiez toujours les sources. Centaure Investissements décline toute responsabilité pour les décisions prises sur cette base.
